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Ces dernières décennies, le processus d’innovation a été radicalement transformé, entre l’apparition de la mondialisation, de la dérégulation, Internet, les nouvelles technologies et la raréfaction des ressources. Cependant, l’innovation est un axe majeur pour rester compétitif, anticiper les tendances et futurs besoins, et utiliser de façon optimale les nouvelles technologies.

Ainsi, à une époque où l’on met en avant la co-création, le marketing participatif, de partage d’idée, d’économie contributive, d’intelligence collective, comment ne pas aborder le sujet du Design Thinking, méthode que tout communicant a, un jour, employé à des fins stratégiques ou conceptuelles comme levier d’innovation.

La question que je me suis posée est de savoir si en 2023, à l’ère du digital roi, le design thinking reste un moyen efficace au service de l’idée de marque tant dans sa conception que dans son déploiement. Cette réflexion est l’objet de cet article.

Petit retour en arrière

Les 4 visionnaires du design thinking

Le design thinking naît dans les années 50, aux Etats-Unis, lorsque le publicitaire américain Alex Osborn met au point la technique du « brainstorming ». L’idée : réunir son équipe et stimuler la créativité en faisant brasser les différentes idées des collaborateurs afin de résoudre un problème en trouvant des solutions.

Ensuite, dans les années 60, le premier programme inter-départemental est créé à l’université de Stanford. Un programme centré sur l’humain dont l’objectif est de faire réfléchir ses membres à différents enjeux.

Puis, dans les années 70, l’ouvrage Experiences in Visual Thinking est publié par Robert H. McKim. Celui-ci-développe les différents préceptes du Design Thinking. Des préceptes largement développés les années suivantes par Peter Rowe qui publie un ouvrage intitulé « Design Thinking » en 1987.

On peut ainsi dire que les théories du design thinking sont nées dans les années 1950, développées et théorisées dans les années 1960 à 1990. Il a grandi dans la Silicon Valley où Apple, Google, Intel, Twitter, Microsoft, LinkedIn, etc., le considèrent comme un véritable accélérateur de conceptualisation de projet et d’innovation.

Principes clés du design thinking

La philosophie du design thinking fournit une boîte à outils pour encourager la formation d’idées divergentes, c’est-à-dire créer de nouveaux choix qui n’existaient pas auparavant, puis les développer. Les humains ont tendance à penser de manière analytique et on leur apprend à le faire dès leur plus jeune âge. Le design thinking est un moyen de favoriser la pensée intégrative. En d’autres termes, lorsque nous développons de nouveaux produits ou services, de multiples tensions apparaissent dans notre esprit :

  • Désirabilité : En premier lieu, nous voulons que notre idée réponde aux besoins des personnes pour lesquelles nous la concevons.
  • Faisabilité : Puis, nous devons nous assurer qu’il est possible de développer notre nouvelle idée avec la technologie actuelle.
  • Viabilité : Enfin, nous devons nous assurer que l’idée crée ou s’ajoute à une solution commerciale durable et rentable.

Ainsi, le processus de design thinking vise à résoudre ces tensions et à proposer une idée qui les résout toutes. Toute idée réalisable doit résoudre ces tensions.

Design thinking

Alors que nous avançons sur la voie d’une pensée centrée sur l’humain, nous devons avant tout trouver ce qui répond aux besoins des gens. Qu’est-ce qui améliore la vie de nos clients ? Qu’est-ce qui facilite la vie de nos employés ? Il y a plusieurs principes de design thinking à garder à l’esprit…

Les attentes client au centre des problématiques

…Centré sur l’humain : si le design commence par se concentrer sur les personnes, il évolue rapidement vers l’apprentissage par la création d’objets ou de services :

  • Créer des mouvements : les bonnes idées se vendent rarement d’elles-mêmes. Raconter des histoires ne suffit plus. Nous devons créer des mouvements autour de nos produits.
  • Collaboration : aujourd’hui, la plupart des activités commerciales se déroulent en équipe. La coopération avec les parties prenantes de tous les départements est donc essentielle.
  • Pensez de manière créative : les individus et les équipes doivent avoir la liberté de penser de manière créative tout au long du processus. La peur de l’échec est le plus grand obstacle à la pensée créative.
  • Posez la bonne question : c’est le principe le plus important du processus de design thinking. Vous devez commencer au bon endroit, il faut donc beaucoup réfléchir dès le départ aux questions que vous posez.

Recette du design thinking

Exemple de design thinking centré sur l’humain : Airbnb

En 2009, Airbnb était sur le point de faire faillite. Comme tant de start-ups, elle avait été lancée, mais personne ne l’avait remarquée. Les revenus de l’entreprise stagnaient alors à 200 dollars par semaine. Répartis entre les trois jeunes fondateurs vivant à San Francisco, cela signifiait des pertes quasi-infinies sur une croissance nulle.

C’est alors que Joe Gebbia, l’un des trois fondateurs, décida d’étudier en détail les problèmes du site. Il identifia que la plupart des photos des résidences en location étaient de mauvaise qualité. Comment louer un hébergement si on ne sait même pas à quoi il ressemble ? C’est alors que Gebbia décida de louer un appareil photo professionnel et alla lui-même photographier les annonces sur New York. Il observa alors pour la première fois une amélioration de ses résultats financiers en passant à 400$ par semaine. Encore loin des résultats escomptés, mais encourageant.

Plateforme Airbnb en 2009

Une des premières interfaces d’AirBnB (2009) avec des images peu engageantes. @waybackmachine

Cette expérimentation a permis à l’équipe d’AirBnB de changer d’état d’esprit face au problème. Ils sont alors passés d’une vision de résolution purement technique (développement du site, ligne de code) à une vision centrée sur l’utilisateur.

Les 5 étapes du design thinking

1. L’empathie

C’est la phase d’identification des différents points de friction ou problèmes, rencontrés par l’utilisateur tout au long de son parcours client. C’est une phase exploratoire lors de laquelle nous allons sur le terrain, dans un but de compréhension et de questionnement. Elle consiste donc à cerner l’utilisateur en appliquant des techniques comme l’observation, l’interview, se mettre à sa place, les études ethnographiques (observation des êtres humains dans leur environnement naturel), et analyse des données collectées.

2. La définition

La phase de définition va permettre de conduire l’ensemble du processus de création. Un challenge précis à résoudre est défini. Les problématiques sont posées et le cadre du projet est défini. Les livrables de la solution sont identifiés pour que chacun sache quel est l’objectif commun à atteindre.

3. L’idéation

L’idéation est le processus créatif et participatif permettant de générer des idées innovantes, en phase avec le problème que nous souhaitons résoudre. Chacun propose des idées et met sa créativité au service du groupe, sans barrière. L’idéation alterne des phases de création seul puis en groupe. Elle est alimentée par des moments de partage d’inspiration où chaque participant va s’informer des innovations du secteur. Elle se clôture par la prise de décision : il s’agit du moment où l’équipe va trouver un consortium et décider de l’idée à prototyper parce qu’elle semble répondre le mieux à la problématique posée.

Jetez un coup d’œil à ces quelques stratégies de brainstorming, peut-être vous aideront-elles à trouver la solution à tous vos problèmes :

  • La séance de brainstorming standard : les membres de votre équipe se réunissent et discutent à voix haute des différentes idées de chacun.
  • Le brainwriting (ou partage d’idées en silence) : chacun écrit ses idées sur une feuille de papier ou note adhésive puis les affiche sur un grand tableau blanc.
  • La pire idée possible : autrement dit l’inverse de votre objectif final. Puisque le ridicule ne tue pas, chacun des membres de votre équipe devra réfléchir à l’idée la plus loufoque possible. Contrairement aux autres techniques de brainstorming peu flexibles, cette technique vous aide à identifier des pistes d’amélioration en examinant les pires éléments d’une solution absurde.

4. Les prototypes d’idéation

Les prototypes : pour ce point, les idées de solutions sont combinées pour en créer des prototypes. Nous ne cherchons pas à créer une version directement parfaite de prototype, mais plutôt plusieurs versions se rapprochant le plus possible de la problématique à résoudre. Nous cherchons donc à développer des prototypes jusqu’à en arriver à la solution finale, soit le prototype réel.

5. Tests et apprentissage

Mode itératif où l’on teste des prototypes (MVP), on collecte des feedbacks, et on comprend davantage ses utilisateurs. Cette étape permet d’obtenir des retours concrets de la part des utilisateurs. Ce moment de test en direct fait émerger des ressentis vis-à-vis du nouveau produit ou service proposé et de l’expérience vécue. L’objectif : savoir si la solution est en cohérence avec les besoins et les usages des utilisateurs, si elle est viable et si des améliorations doivent être apportées.

Les 5 étapes du design thinking

Comment le design thinking peut vous aider à repenser votre marque ?

Le design thinking améliore la réflexion empathique. Cela a pour effet d’aider vos équipes à faire coïncider votre marque avec les besoins de vos clients.

Certaines marques ont décidé de se concentrer sur les besoins et les désirs des clients pour être compétitives. Cela demande de créer des expériences de marque agréables pour les clients. Mais les méthodes de marketing classiques deviennent de moins en moins efficaces, car les clients d’aujourd’hui veulent plus que la satisfaction de leurs besoins. Les entreprises doivent donc laisser des impressions durables sur leurs clients grâce à des expériences mémorables. Cela impose de (re)penser tous les points de contact avec le client pour qu’ils aient une expérience unique, personnalisée et surtout, satisfaisante.

C’est le rôle de la marque que de donner du sens. Au-delà des usages et des comportements, la marque s’appuie sur les valeurs, les émotions et les imaginaires des individus pour construire un territoire culturel fort. Cette culture de marque suscite la confiance du consommateur, stimule son désir d’identification, et donne à la marque – ainsi qu’à l’acte de consommation lui-même – sa pertinence.

Appelons ce nouveau champ « brand design thinking ». Une approche qui nécessite l’émergence d’une nouvelle génération de spécialistes de l’innovation, formés aussi bien à la rigueur des études marketing qu’aux enjeux de marque, sans oublier la créativité, longtemps considérée comme l’apanage des seuls designers…

Qui dit marque, dit expérience ! Les marques ont un ADN qu’il convient de continuer à cultiver et développer. Cela rassure vos clients finaux et leur propose ainsi une approche personnalisée. Ainsi, lorsque tous les processus de conception sont en lien avec les valeurs de votre marque (qui est souvent proche de celle de vos clients), votre produit ou service offrira une meilleure expérience.

Exemple de design thinking orienté marque : Apple

Avant toute chose, il est important d’introduire un peu de contexte : Apple a été fondé en 1976 par Steve Wozniak, Ronald Wayne et Steve Jobs. Cependant, avant de devenir le géant de la tech que nous connaissons, l’entreprise a connu une période difficile.

En effet, suite à des conflits internes, Steve Jobs a décidé de quitter l’entreprise en 1985. Il s’en est suivi une période creuse pour la marque à la pomme, entre changement de direction, échecs commerciaux à répétitions, perte d’identité et de fidélité des utilisateurs face à tous ces problèmes et enfin, la fin du monopole et un premier problème concurrentiel avec l’arrivée des PC d’IBM et un second concernant Mac OS face à Windows.

Heureusement pour Apple, Steve Jobs décide de revenir et d’appliquer une toute nouvelle stratégie basée sur les principes du Design Thinking en plaçant l’utilisateur au cœur de la conception.

En 1997, Steve Jobs avait déjà saisi l’importance de l’empathie et pourquoi il fallait se mettre à la place des utilisateurs pour concevoir des solutions pertinentes.

La méthode Design Thinking selon Steve Jobs

Les 3 grands principes à appliquer :

  • Désirabilité de l’utilisateur : Le produit doit satisfaire les besoins du consommateur en résolvant les problèmes quotidiens grâce à un processus centré sur l’utilisateur. Pour cela, des outils tels que les « personas » ou les « Customer Journey Map » sont très efficaces !
  • Viabilité du marché : Les produits réussis nécessitent une stratégie de marketing intégrée qui identifie le segment cible et construit la marque du produit en fonction de ce segment cible. Des outils tels que le « Business Model Canva » peuvent vous aider !
  • La faisabilité technologique : La technologie doit être adoptée tout au long du processus de développement, y compris au stade du prototypage !

Cette nouvelle vision a permis à Apple de se concentrer sur les besoins et les désirs réels des utilisateurs, plutôt que ceux de l’entreprise afin de susciter de l’empathie et de développer l’image de marque auprès des gens. Le tout à l’aide de produits simples à utiliser, mais terriblement efficaces. Plus que de la fidélité, Apple a réussi à créer une relation émotionnelle avec ses utilisateurs !

Le design thinking et la communication  

Lorsque la marque Pulco cherche à se donner un nouvel élan (« La vie à la fresh »), elle le trouve dans son territoire d’origine : la paresse, et dans les imaginaires consommateurs associés. Ces aspects priment de ce fait sur les qualités objectives du produit et de son mode de consommation (frais, désaltérant, facile à préparer).

Pulco publicité

Le design thinking à l’heure du digital

Après la crise sanitaire causée par la Covid, la plateforme collaborative de développement touristique de la région Auvergne-Rhône-Alpes a souhaité relancer le tourisme de proximité. L’objectif était de contribuer à un tourisme respectueux des enjeux environnementaux en valorisant les économies locales. L’idée était aussi de créer du lien entre les habitants et les visiteurs de la région.

Avec sa méthode inspirée du design thinking, l’agence Aperience a mobilisé les acteurs concernés afin qu’ils construisent ensemble une solution. En comprenant mieux les usages, ils ont alors proposé des initiatives adaptées. Un prototype digital a rapidement vu le jour. C’est un guide de voyage numérique recensant des activités touristiques locales (balades, sports, restauration, loisir, artisanat, culture…), respectueuses des valeurs du « tourisme bienveillant ». Animée par une communauté d’habitants engagés, les « éclaireurs », la plateforme Partir-ici était ainsi née.

Le design thinking à l’heure du digital - Partir-ici

Soit !

Vous savez désormais tout sur la méthode du Design Thinking ! À votre tour d’utiliser cette approche révolutionnaire pour la résolution de problèmes et la création de tous vos projets.

Ressources & méthodes

30 outils de Design Thinking qui favorisent l’innovation

« Design Branding – (Re)penser les marques par le Design Thinking » – de Sylvie Gillibert, François Cassignol, Olivier Creusy

Petit guide pour réaliser un prototype efficace

Kits outils Design Thinking

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Jean-Charles Espy – Enseignant en Master Communication à l’Université Toulouse Capitole, Toulouse School of Management, Infocom UT3 et gérant de Brand Consulting Team.
A votre disposition pour : Audit et ConseilAMO CommunicationFormations Intra-EntrepriseConférences.
Mail : jc.espy@bcteam.fr
Website : www.bcteam.fr

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